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Andalousie - Automne 2022

Me voici de retour sur le blog. Grâce aux après-midis à la fraîche imposés par le climat torride d’Andalousie, je suis quasiment à jour du tri et du traitement de mes photos du séjour, j’ai décidé de rompre ma règle sacré de publier les articles dans l’ordre chronologique.

Je fais donc un saut en avant d’un an et demi dans le temps pour vous raconter nos aventures espagnoles et je reviendrai tranquillement à nos aventures américaines plus tard.

Mi-septembre, on se met en route de Nantes vers Grenade où Ulysse a une conférence professionnelle d’une semaine. On a décidé de faire nos vacances là-bas pour éviter l’aller-retour en avion, coûteux en émissions carbone. L’autre alternative c’était d’y aller en train (mais c’était très long et très cher) ou en bus. On s’est finalement décidé pour la voiture initialement avec l’idée de prendre des covoitureurs mais avec la recrudescence de cas de COVID et le besoin sérieux de vacances, on est parti qu’à deux dans la petite C3. On en a profité pour faire un arrêt dans nos familles respectives à Bordeaux et à Biscarrosse avant d’aller jusqu’à Grenade.

On fait étape au Nord de Madrid pour éviter la traversée un vendredi soir à la sortie des bureaux. Après le verdoyant Pays-Basque, on roule à travers des champs de blés et on croise ici et là quelques montagnes escarpées. On se demande où vivent les espagnols car on croise très peu de villes malgré le paysage très plat et qui s’étend à perte de vue. On en profite pour flâner dans l’enceinte fortifiée et le chateau de Buitrago del Lozoya où on entend avant d’apercevoir notre premier oiseau du trajet (l'aigle botté) qui s’avère être aussi un lifer. Dans ces petits villages un peu déserts, point d’option végétarienne dans les restaurants et peu de restaurants. On reprend la route avant l’aube et dans le village perdu de Sieteiglesias, la fête a dû être arrosée la veille car on doit slalomer sur la route entre des plots éventrés et éviter les derniers fêtards qui rentrent. 

On arrive à Grenade vers midi le samedi. Après avoir posé la voiture dans un parking à qui je remets les clés de la voiture (en étant pas tout à fait sûre de retrouver la voiture une semaine plus tard compte tenu des mes compétences très rouillées en espagnol), on se met en quête de tapas. C’est la découverte des patates bravas pour moi dont la petite sauce piquante me régale alors qu’Ulysse se régale avec les aubergines rôties avec du miel et de la molasse. Afin de se réveiller un peu, on marche au hasard des rues et nos pas nous portent assez rapidement vers le quartier de l’Albaicin qui se dresse sur la colline en face de l’Alhambra. Les maisons de style arabe d’un blanc lumineux sont agrémentées de glycine, de bougainvilliers et de fleurs bleues. On n’a pas trop tenté de viser un point en particulier au milieu de ce dédale de rues minuscules escarpées mais on a quand même réussi à trouver (un peu par hasard) le mirador de la plaza San Nicolas qui offre un point de vue sur l’Alhambra. Le dimanche, on fait une incursion près des rives du fleuve Genil où des guêpiers d’Europe ont été vu récemment (oui oui, au bout d’une journée en ville je cherche déjà la nature). Point de guêpiers, les rives sont bien sèches… On repart donc vers les jardins du Carmen de los Martires sur les hauteurs de Grenade. Le parc assez sauvage laisse les arbres libres de s’entremêler, procurant une ombre et une fraicheur bienvenue avant de laisser place à des terrasses plantées d’arbres fruitiers où on entend chanter les fauvettes mélanocéphales (Lifer!). Notre AirBnb est dans la Calle Elvira. Excellent choix pour sortir et être à proximité des bars et des restaurants, choix bien plus douteux pour dormir sereinement. On finira la semaine avec des boules Quies pour tenter de contrer l’enthousiasme tonitruant des espagnols qui semblent rester dehors jusqu’à 5h du matin absolument tous les soirs, seulement interrompus par les bars qui viennent jeter le verre au recyclage ce qui fait un boucan monstrueux tous les soirs. Ah oui, parce que du coup on travaille la semaine qui suit, moi depuis le AirBnB et Ulysse depuis le palais des Congrès. On se retrouve le soir pour tester tous les restaurants végétariens : Hicuri (mon premier cordon bleu depuis des années et il est même vegan!), Wild food, El Piano, Papa Elvira pour les midis. Mais notre préféré reste sans nul doute La Goma où on fera tous nos derniers repas à Grenade. Petit restaurant avec ses habitués, loin des rues à tapas, le menu (écrit sur un petit bout de papier à la main) y change tous les jours et le gérant le fait circuler d’une table à l’autre. Les plats de la veille sont transformés en tapas pour accompagner l’apéro qui a tendance à s’éterniser un peu mais qu’importe tellement les plats qui suivent sont bons. Le jeudi soir, je me décide à finir de travailler à l’heure et à aller tester les bains Hammam Al Ándalus pendant qu’Ulysse est bloqué à sa conférence. Il faut réserver en avance car ils limitent le nombre de personnes par session ce qui contribue complètement à la sérénité du moment. La décoration arabe à l’intérieur est magnifique et j’alterne les bains chauds, froids, le hammam et les dégustations de thé avant de déconnecter complètement en flottant dans les bains chauds.

 

Le samedi suivant, le 24 septembre, le réveil sonne encore mais cette fois c’est pour regagner l’Alhambra à l’ouverture. L’Alhambra, la “rouge” en arabe, est une forteresse ou plutôt une cité entière perchée au sommet d’une colline surplombant Grenade. On a bien réservé nos tickets en avance comme recommandé par 100% des gens à qui on a mentionné notre voyage à Grenade. On commence par les palais Nasrides, ces palais arabes qui datent du Moyen-Age et qui ont survécu à la Reconquista des rois catholiques. On y observe des arabesques d’une finesse incroyable qui forment une dentelle dans les enduits muraux clairs qui se marient incroyablement bien avec la sobriété du bois, des mosaïques colorées de céramiques (alicatados, azulejos), des voûtes qui semblent couvertes de stalactites, des bassins… On comprend mieux que même les rois catholiques aient eu envie de préserver ces joyaux d’une autre culture. Après 3h de culture grâce au guide audio, je retrouve avec plaisir le chant des oiseaux dans les jardins magnifiques de Generalife. J’y observe ce qui ressemble à des terriers de guêpier d’Europe mais point de guêpier (on les a loupé à une semaine près, ils sont déjà repartis sous des hospices plus favorables pour hiverner). Après tant de raffinement, le palais massif et imposant de Charles Quint et l’intérieur sombre et chargée d’or de l’église Santa Maria nous semblent particulièrement rustres. On a quand même trouvé la cour circulaire du palais de Charles Quint impressionnante. On a fini par l’Alcazaba, la partie militaire fortifiée de l’Alhambra, qui est moins bien conservée que les autres bâtiments mais qui offre une vue imprenable sur Grenade. On ne s’attarde pas trop car le soleil s’acharne à chauffer comme en été malgré le fait qu’on soit début octobre. Après s’être posé une partie de l’après-midi, il est probable qu’on ait fini à la Goma en prenant notre dessert à la Heladería Los Italianos (vu la file d‘attente à 17h, on a préféré entendre 21h/22h pour déguster une glace au yaourt).

Le dimanche, il est temps de plier bagages. On récupère la voiture et on met le cap sur la Laguna de Padul, une zone humide à une vingtaine de minutes au sud de Grenade. Le paysage n’est pas fantastique et les tirs des chasseurs se font entendre très proches. On finit quand même par entendre et voir des Astrilds ondulés. Cette espèce de passereau est originaire d'Afrique Subsaharienne e a été introduite sur le bassin méditerranéen où elle est présente au Portugal et se répand à travers l'Espagne. Ils se déplacent en groupe et se sont arrêtés 5 secondes au-dessus de notre tête pendant lesquelles mon appareil photo a préféré faire la mise au point sur les feuilles que sur les piafs. Autre observation notable: notre premier Torcol fourmilier, un pic au plumage très cryptique (pas de chouette photo malheureusement car il était assez loin), et des hirondelles rousselines en vol. On voit également des gobemouches noirs absolument partout. Quand le soleil atteint le zénith, on bat en retraite et on poursuit notre route vers la Sierra Nevada et plus précisément vers la vallée des Alpujarras.

Au fond de la vallée, on trouve un trio de villages à flanc de montagne : Capileira, Bubion, Pampaneira. Les maisons ont les murs blanchis à la chaux, les toits plats et les rues escarpées, pavées et étroites sont parsemées de plantes. Rejoindre la rue principale ou la voiture depuis notre logement en contrebas nécessite un peu de motivation. On fait une petite balade au coucher du soleil entre Bubion et Pampaneira. Le lendemain, on part pour une balade tranquille au dessus de Capileira. Notre objectif, pas très ambitieux, est de sortir de la forêt pour pouvoir chercher l’Accenteur alpin qui comme son nom l’indique est plutôt présent à l’étage alpin. A la sortie de la forêt, c’est un ballet de mésanges (mésanges noires en particulier mais aussi quelques huppées, charbonnières et bleues), de roitelets et de grimpereaux qui nous salue. Les traquets motteux et les rouges-queues guettent les insectes au sommet des rochers. On voit passer coup sur coup un gypaète barbu juvénile puis un aigle royal alors que le soleil commence à chauffer. Une chose en entrainant une autre, on finit au sommet à 2700m avec les bouquetins. En redescendant, des groupes d’alouettes des champs en vol nous font croire un instant à la présence d’accenteurs alpins. Mais non, point d’accenteur mais une bien belle balade d’une quinzaine de kilomètres et 600m de dénivelé.

Le soir, on s’accorde une petite pizza pour compenser toutes les calories perdues en marchant. Le restaurant sert la sangria uniquement en carafe, ce qui conjugué à l’absence d’eau (en Andalousie, ils n’apportent juste pas d’eau dans les restos) a bien vite raison de ma sobriété.

Le lendemain on reprend la route pour aller vers Cabo de Gata. On traverse ainsi la province d’Almeria. Malgré son surnom bucolique de “potager de l’Europe”, la région est particulièrement hideuse. En cause, 38000 hectares de serres en plastique où poussent tomates, courgettes, aubergines et autres légumes (bio ou pas d’ailleurs) qu’on retrouve toute l’années dans les grandes surfaces et les marchés européens. Au-delà du désastre écologique (dans une région venteuse comme l’Almeria, tout ce plastique finit dans la mer et les nappes phréatiques se tarissent malgré des puits de 800m de profond), cette agriculture dépend de la main d’oeuvre immigrée sans papier, payée en dessous du SMIC horaire (soit 35euros/heure), vivant dans des bidonvilles construits à partir de matériaux de récupération, exposée aux produits chimiques et aux fortes chaleurs,…

Mais au milieu de ce désert de bâches, on a trouvé quelques oasis pour les oiseaux. A la Salina de Cerrillos, on voit notre première glaréole à collier (juvénile, donc un peu moins élégant qu’un adulte) et des flamants roses. Glaréole à collier qui est aussi ma 550ème espèce d'oiseau identifiée! Cet oiseau étrange est un limicole (parfaitement camouflée quand elle est au sol) mais qui se nourrit principalement en vol en capturant des insectes en décrivant des courbes comme une hirondelle géante avec sa queue fourchue. C'est le seul limicole adapté à la vie dans les airs, les autres limicoles utilisant normalement leurs longues pattes et bec pour chercher des petits invertébrés dans la vase. D'ailleurs, on croise aussi un bécasseau variable juvénile, un chevalier aboyeur à distance, un petit gravelot, un ibis falcinelle, des busards des roseaux qui survolent la roselière, et un timide gorge bleue à miroir dans la vase. 

Notre arrêt suivant dans la saline est moins fructueux (à part une bécassine des marais) car la saline est quasiment entièrement à sec. 

On continue notre route vers San José mais il nous semble qu'on ne sortira jamais de l'enfer des serres d'Alméria. Notre GPS nous indique qu'on est arrivé dans 10 minutes et pourtant on est encore encerclé de toute part de ces structures bancales de plastique. Le parc naturel de Cabo de Gata semble vraiment être conçu comme un bout de nature mis sous cloche pour les touristes privilégiés que nous sommes alors que chaque mètre carré en dehors du parc est exploitée jusqu'à n'en plus pouvoir...

On se pose, un peu assommés par les paysages et la distance parcourus. 

Le lendemain matin on retraverse un bout de paysage de serres pour atteindre le phare de Cabo de Gata. On y découvre avec beaucoup de bonheur nos premiers Cochevis de Thékla. Ces alouettes, bien camouflées avec leur plumage beige, se reconnaissent toutefois facilement à leur silhouette huppée et à leur chant mélodieux qui accompagnera le reste de notre voyage. Il nous semble être revenu aux USA avec le chant des Western Meadowlarks tant les prairies nous avaient semblé silencieuses depuis notre retour en Europe. On y voit aussi notre premier Monticole bleu, surnommé le merle bleu. Pourtant sous la lumière déjà dure du soleil matinal, il nous semble qu'il n'est pas très bleu. On découvre aussi plusieurs Traquets rieurs en livrée noire et blanche qui escaladent les rochers ou guettent les insectes depuis les fils électriques. On marche jusqu'à Punta Baja, et ses roches volcaniques en orgue qui nous évoque une mini Chaussée des Géants (Irlande du Nord). Le soleil est déjà bien haut quand on s'aventure du côté des salines de Cabo de Gata qui sont entièrement désertes et pour cause... aucune flaque n'a résisté à la sécheresse. On a un peu plus de chance après avoir traversé la ville de Cabo de Gata (pas très heureuse par ailleurs) puis la plage Del Charco (sur laquelle on croise notre premier Goéland d'Audoin reconnaissable à son bec rouge). On découvre à la Rambla de los Morales une petite oasis avec flamants roses, un bécasseau sanderling très peu farouche qui vient quasiment jusqu'à nos pieds, des grèbes, des foulques, plusieurs limicoles et une autre découverte ornithologique inattendue : une érismature à tête blanche. On se promet de revenir ici sous une meilleure lumière et avec des températures plus clémentes car nous sommes en train de rôtir. 

Le lendemain, on part vers le Nord-Est jusqu'à Rodalquilar. Le lever matinal est récompensé par un joli lever du soleil dans l'anse dans laquelle un voilier a jeté l'ancre. Après une session photo, on tente de se mettre en route pour une randonnée mais je fais plusieurs fois marche arrière pour tenter de prendre une photo d'une chouette chevêche repérée par l'oeil aiguisé d'Ulysse. Se faire photographier ne faisant nullement partie des plans de notre Chevêche, bien occupée à chasser, je me concentre sur une fauvette mélanocéphale qui veut bien sortir des fourrés plus de 2 secondes, un Cochevis de Thékla dont la silhouette se découpe dans la végétation et une femelle Ibex avec un des ses deux jeunes à contre-jour. L'application Alltrail que nous utilisons pour les randos voit des chemins là où il n'y en a pas vraiment et rapidement on se retrouve à progresser au milieu de la végétation sans chemin ce qui nous ralentit considérablement: les buissons qui nous semblaient bas sont en fait assez touffus et ne nous permettent pas de voir où nos pieds vont atterrir ou sur qui. Heureusement pas de rencontres avec une vipère endormie et on finit par rejoindre le chemin. Les buissons secs font le bonheur des fauvettes mélanocéphales et d'une fauvette passerinette identifiée après coup. On croise une pie-grièche méridionale, bien reconnaissable à son bec crochu, qui guette sa prochaine proie avant de l'empaler sur un buisson épineux. Farouches, aucune des pies-grièches du voyage ne se laissera approcher suffisamment pour une jolie photo. On croise également nos premiers grands corbeaux reconnaissables des corneilles noires à leurs becs plus massifs. Le téléphone d'Ulysse fait de superbes photos mais ne nous y trompons pas, le paysage est tout sec! La fin du chemin me semble longue car mon genou a décidé de ne pas suivre et le soleil de l'après-midi est impitoyable. On finit quand même par rejoindre la voiture et je fournis un dernier effort pour aller jeter un coup d'oeil au château San Ramon. Les criques autour sont incroyables avec l'eau limpide,  la roche claire et lisse magnifique et ... plein de naturistes! 

Après une sieste, on se met en route pour une petite session observation des poissons sous l'eau sur la Playa de los Genoveses. 

Le lendemain, mon genou étant toujours en grève, nos projets de randonnée sont convertis en session observation et photo à la Rambla de los Morales au lever du soleil. 

 

Après le lever du soleil dans la rambla avec les oiseaux, on est rentré tranquillement au Airbnb pour plier nos affaires, on a bu des smoothies (Notre repère à San José, c'est un petit café en face du restaurant la Mandrogara (très bon aussi!) qui sert des batidos (smoothies) délicieux pour le goûter. On termine avec une visite à la plage de Monsul où une scène d Indiana Jones a été tournée. Pas de baignade cette fois car les vagues étaient assez grosses et l'eau plutôt froide. 

Direction Tabernas, à une trentaine de kilomètres au nord de San José à l'intérieur des terres. On commence par explorer notre chambre d'hôtel qui donne sur la place de l'église et le café en face en attendant que les températures redeviennent raisonnables. Tabernas est surplombé des ruines d'un petit château arabe. La colline du château au coucher du soleil nous a donné une jolie vue sur le début du désert de Tabernas qui apparemment est le seul vrai désert d'Europe d'un point de vue climatique, les autres déserts européens étant en réalité des zones semi-désertiques.  Le village en lui-même nous semble assez délabré et on peine à trouver un resto végétarien. On finit dans le resto d'un hôtel qui nous sert des pommes de terres recouvertes d'une colline d'aïoli qui nous a probablement bouché quelques artères. 

Le lendemain matin, on a démarré en même temps que le soleil et on a fait une jolie balade d'une dizaine de kilomètres au milieu du désert dans les décors de western. Dans les années 60/70, les western spaghetti (appelés comme ça parce que les réalisateurs étaient italiens) étaient tournés dans la région car les figurants espagnols coûtaient moins chers que les figurants américains et les paysages rappellent l'ouest américain. Résultat: certains décors sont encore en place. dont une oasis qui a été créée pour le film Laurence d'Arabie. On se régale des structures géologiques en pattes d'éléphant créées par l'eau lors des pluies brèves et fortes qui emportent une partie de la terre. On se croirait presque de retour aux USA si ce n'est que l'autoroute n'est jamais bien loin... Je profite de cette chouette rando pour enfin capturer une photo d'une fauvette mélanocéphale, espèce qui me nargue de son chant depuis Grenade tout en restant bien cachée dans les buissons touffus. 

Le lendemain matin, c'est spéléologie dans les grottes de gypse de Sorbas à l'est de Tabernas. A notre arrivée, on croise une dame visiblement remontée et particulièrement ronchon dont on comprend rapidement qu'il s'agit de notre guide... Voilà qui promet. On découvre rapidement qu'elle n'a pas été prévenu que le nombre de personnes excède le nombre de place dans son mini-bus et qu'il va falloir que certains prennent leurs voitures perso sur le chemin tout cabossé qui mène à l'entrée de la première grotte. Heureusement, elle se déride rapidement et c'est l'occasion de travailler notre espagnol car on est les seuls non hispanophones du groupe et les traductions en anglais de la guide sont bien plus courtes à chaque fois que la version espagnole! L'eau de pluie dissout lentement le gypse, donnant lieu à une abondance de dépressions (dolines) en surface. A la surface, les figuiers sont autant d'indicateurs de ces dolines à éviter sous peine de chute.

Après une pause midi dans le resto des grottes, on s'est rendu à Guadix. Petite ville très bizarre: d'une part, très mignonne avec ses maisons troglodytes et les jolies formations géologiques qui semblent absorber la ville, d'autre part des déchets et des chiens errants partout et des chevaux et des moutons dans des enclos minuscules dans le jardin de gens en plein milieu de la ville...

On loge dans une petite maison troglodyte trop mignonne, véritable petit labyrinthe qui nécessite de bien penser à baisser la tête (on en est ressorti avec quelques bosses). Comme on a récupéré une cuisine, on se refait avec plaisir à manger car les options végétariennes des restos ne sont ni nombreuses ni appétissantes. Je commençais à saturer des légumes grillés à l huile ou des œufs brouillés aux asperges.

Le lendemain, on a fait une balade dans les badlands autour de Guadix à côté du village de Fonellas. C'est un milieu aride de steppes pré-désertiques dans lequel on espérait voir deux oiseaux bien particuliers (l'Outarde canepetière et le Ganga unibande). La balade part du village et longe une monoculture de peupliers pas très heureuse avant d'arriver vraiment dans les badlands bien plus agréables à regarder. Pas de trace d'outarde ni de ganga, mais on a trouvé un ravissant petit hermitage troglodyte auprès duquel voletaient d'adorables fauvettes pitchous et un tarier des prés. On a aussi assisté au vol acrobatique incroyable d'une huppe fasciée.  

Le lendemain, on a été dans le village de Gorafe et on a loué des vélos électriques au fond d'un garage pour parcourir le désert de Gorafe (30km et 600 m de dénivelé, trop facile).  La lumière et la brume au lever du soleil sur la roche façonnée par l'eau à perte de vue nous ont régalé d'un spectacle incroyable et on a retrouvé les sensations d'immensité des USA pour la première fois depuis notre retour. On aperçoit depuis le chemin la "Casa del Desierto", qui apparait dans un épisode de Black Mirror, une maison entièrement en verre, conçu comme un projet pilote par une entreprise souhaitant valider la résistance et la pertinence de leur verre même dans les conditions les plus extrêmes. 

Pour fuir la chaleur de l'après-midi, on se réfugie dans la cathédrale de Guadix (trop de doré!) avant de faire le tour des potiers sur le chemin du retour. 

Le lendemain, départ de Guadix pour l'un des plus grands parcs naturels d Espagne : Cazorla!

Au passage, on profite de la lumière matinale sur le réservoir de Negraltin. On fait une toute petite balade à Castril le long d'un ruisseau à flanc de paroi. J'y trouve un couple de cincle plongeur et une fois n'est pas coutume, photo en contre plongée et non à leur niveau, couchée par terre. On regagne Castril à travers les champs d'oliviers ce qui me donne la brillante idée de goûter les olives. Pas bon... du tout! Affreusement amères! Au pluriel, car j'ai voulu m'assurer qu'il ne s'agit pas d'un biais d'échantillonnage. La ville de Castril se prépare à accueillir une féria et toute la ville est en effervescence. Ils préparaient la feria donc c était le bordel dans le village.  

Après Castril on a filé vers le massif de Cazorla en redescendant dans la plaine couverte d oliviers sur le sol à nu (Notre guide d hier nous a dit qu'apparemment ils laissent le sol à nu pour pas qu'il y ait de compétition pour l eau entre l herbe et les oliviers sauf qu' en 5 ans ils pourraient avoir un couvert végétal mature qui aide à retenir l eau et à rafraîchir le sol )

On A découvert le village de Cazorla au détour d'une colline d oliviers. C est un petit village tout escarpé et il y avait des travaux dans la rue de notre Airbnb au sommet du village donc on a du garer la voiture en bas du village à une vingtaine de minutes

[Le soir on a fait une balade très chouette dans la vallée du village

Le lendemain est probablement notre journée préférée de toutes les vacances. On fait une rando incroyable dans le massif de Cazorla en suivant un ruisseau, le rio Borosa, de son embouchure jusqu'à sa source. A chaque arrêt, on se motive pour pousser un petit peu plus loin et bien nous en prend. Après ce que l'on pensait être la fin de la balade, commence le véritable spectacle avec d'abord une succession de cascades incroyables qui nous servent de cadre pour le déjeuner. Le ballet de quelques bergeronnettes des ruisseaux me retient quelques minutes de plus. On poursuit ensuite au pied des falaises en compagnie des hirondelles de rocher, camouflées à la perfection. Encore quelques mètres, un lacet et on aperçoit les falaises striées ocres et grises du sommet après 12km de marche. On entend avant de les voir les vautours fauves qui sifflent juste au dessus de notre tête ! Je retrouve une énergie nouvelle pour me hisser à leur niveau. Je n'en reviens pas d'"entendre" les vautours... Mais ce n'est pas tout, bientôt l'oeil affûté d'Ulysse repère la queue cunéiforme d'un vautour pas comme les autres, le gypaète barbu. Il constitue l'ultime maillon de la chaine alimentaire, se nourrissant principalement de moelle et d'os qu'il avale après les avoir brisés en les laissant tomber sur des rochers. J'immortalise son vol à notre niveau avec un sourire de gamine. On continue encore un peu notre exploration, car un tunnel traverse la falaise, juste assez large pour une personne, le reste du tunnel étant occupé par un conduit d'eau. On va ainsi jusqu'à la source du Rio Borosa. Il nous faut maintenant, rentrer car finalement il est 15h et on a fait que la moitié de la rando. Au passage, on essaie d'aider une brebis perdue dans le tunnel à ressortir mais sans grand succès. Le tonnerre commence à gronder et quelques pierres roulent des falaises, nous faisant presser le pas. Le retour sur un terrain moins escarpé réveille cette stupide douleur dans mon genou et le retour à la voiture semble un peu long mais le souvenir des vautours décollant au-dessus de nos têtes aide à aller plus vite! A notre retour dans Cazorla, la ville est en pleine célébration de la Fête de l'Adelantamiento:  les rues du centre ville sont décorées et les habitants déguisés en nobles, ecclésiastiques, soldats, artisans, éleveurs pour faire revivre le Cazorla du 16ème siècle. Pour notre part, on fait revivre nos estomacs avec une pizza!

On continue avec l'observation des vautours fauves au Mirador del Chorro après 6km de piste avec mon pauvre petite C3 (qui clairement le vit bien mieux que moi). On entend des grognements impressionnants juste à côté de nous que l'on essaie de suivre sans grand succès. Verdict: des sangliers en rut!

 

Notre prochain et dernier arrêt est la ville d'Andujar. J'ai le privilège de devoir garer la voiture dans un parking souterrain avec ascenseur pour voiture, le tout dans une rue à sens unique, dans laquelle les Espagnols s'impatientent vite. Dans ma volonté de pacifier les choses, je me gare n'importe comment sur le trottoir le temps qu'Ulysse trouve un moyen de faire monter l'ascenseur, me mettant ainsi dans un angle impossible pour pouvoir rentrer dans cet ascenseur... un bonheur!

Heureusement, le lendemain matin, pas besoin de prendre la voiture. Notre guide naturaliste vient nous chercher avant le lever du soleil pour essayer d'aller voir le lynx ibérique. Et on l'a vu!! Une femelle et ses deux petits de l'année (Mars) et un autre âgé de 2 ans. Ils étaient un peu loin sur la piste en contrebas pour faire de jolies photos mais avec la longue-vue des guides, on les a observé pendant 3h vaquer à leur occupation. Le parc naturel d'Andujar en lui-même est très étrange. Une longue route unique, ou plutôt une piste avec d'énormes baignoires sur laquelle on est bien content de ne pas avoir amené notre C3, au milieu de propriétés privées, pour la plupart des réservés privées de chasse qui garantissent au chasseur de repartir avec un beau trophée. Les grands mammifères y sont nombreux (cerf, daim, mouflons,..). D'ailleurs, on y est pendant la saison du brâme du cerf, et les mâles se répondent d'une vallée à l'autre de leurs voix graves... Le lynx y trouve cependant refuge et cohabite avec les chasseurs plus intéressés par le gros gibier que par les lapins qui constituent le gros de l'alimentation du lynx. Une bien étrange cohabitation entre le monde cynégétique et naturaliste donc... Le lynx ibérique est l'espèce de félin la plus menacée au monde. La myxomatose, une maladie virale originaire d'Amérique du Sud, a été introduite intentionnellement en France dans les années 1950 pour contrôler les populations de lapins sauvages, considérés comme nuisibles par les agriculteurs. Le virus s'est ensuite propagé vers le sud-ouest de la péninsule ibérique, décimant les populations de lapins et, avec elles, le lynx. Toutefois, grâce à des mesures de conservation, sa population est passée de 100 individus au début des années 2000 à 1000 individus en 2022, avec les plus grosses populations à Donana et Andujar. Contrairement à l'image du lynx très élusif, notre guide nous décrit des lynx assez visibles et peu sensibles à l'activité agricole sur certaines propriétés. 

On profite aussi de la journée pour observer une trentaine d'oiseaux dont le vautour moine, l'aigle impérial ibérique et la pie bleue. On est à la fois contents de notre journée et un peu décontenancées du rythme. On n'est pas trop habitués à chercher les oiseaux en voiture et on a l'impression d'avoir fait beaucoup de kilomètres sans avoir eu vraiment l'occasion d'explorer le parc à pied à notre rythme. On a eu beaucoup de chance de pouvoir observer le lynx, mais je crois que ça confirme que nous ne sommes pas très fans du tourisme naturaliste intensif!

On rentre à Andujar où les oiseaux en cage sont sur toutes les terrasses. Décidément, ce voyage nous laisse un sentiment partagé du début à la fin. Je finis toutefois sur une note agréable le lendemain matin. 

Pendant qu'Ulysse savoure une matinée posée, je m'aventure à la Ropeja, le village d'à côté, où notre guide de la veille m'a indiquée que je pouvais trouver des pies bleues. Je tombe d'abord sur un tout petit pic que je n'avais encore jamais observé: le pic épeichette. Je poursuis ma petite balade le long d'une rivière où j'aperçois un autour des palombes en vol. Je vois bien quelques pies bleues mais comme la veille, elles rasent le sol en volant et disparaissent très vite dans le feuillage des arbres. Je m'en retourne un peu déçue, sous un soleil de plomb. Alors que je ne suis plus qu'à quelques centaines de mètres de la voiture, une famille d'orites à longue queue vient me saluer. Et puis quelques mètres plus loin, je revois un groupe de pies bleus. A nouveau, elles disparaissent dans le feuillage, mais cette fois, l'une d'entre elles reste visible pendant 20 secondes. C'est tout ce qu'il me faut pour une petite photo souvenir. Je repars le sourire aux lèvres et les poches de mon sac pleines de grenades glanées sur le chemin. 

Voilà pour ces vacances, il nous reste à reprendre la route pour rejoindre Bidart où l'on fait étape chez Maria et Benji avant de rejoindre Nantes. 

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